:: Point
de vue historique ::
L'histoire
du cinéma britannique commence comme celle de nombre de cinématographies
(voir l'historique pour plus d'info). C'est avec la seconde révolution
industrielle de l'industrie du cinéma britannique va connaître
ses premiers bouleversements, en effet les grandes compagnies éclatent
au profit de petites (ce qui vaudra à l'industrie du cinéma
britannique le surnom de "cottage industry"). Les grandes
compagnies restant sont étrangères, et françaises
en particulier (Gaumont British, Pathé
).
Comme
dans les autres pays européens, avant la première guerre
mondiale, le cinéma américain était minoritaire en
Grande Bretagne : 15% des films étaient britanniques, 35% américains,
et 50% français ou italiens.
En 1920, le cinéma américain représente 90% des films.
La situation préoccupe fortement la classe dirigeante britannique,
d'autant plus qu'en 1925 la Grande-Bretagne ne produit plus qu'une vingtaine
de films par an. En 1927 est donc mis en place le Cinematograph Film
Act (ou Quota
Act) qui impose des quotas sur les programmations de films : 5%
doivent être britanniques (ce chiffre passera à 20% en 1936,
et à 30% après la deuxième guerre mondiale). Une
licence d'importation est aussi mise en place : l'importation d'un film
étranger n'est autorisée qu'en échange de la production
d'un film britannique (la plupart du temps un quota quickie). Ces
mesures permettent de nettement relever, si ce n'est la qualité,
tout du moins la quantité de films britanniques : 128 films sont
produits en 1929.
Arrivé à ce stade, un nouvel élément vient
perturber l'industrie du cinéma britannique : l'arrivée
du son. En effet, le passage au son coûte cher, puisqu'en plus de
l'équipement, il faut payer des droits à l'une des deux
(américaine ou allemande) compagnies qui détiennent les
licences de l'invention.
Une
fois le problème du passage au son réglé, la lumière
va venir de trois individus :
- John Maxwell : Il crée en 1928 la première grosse compagnie
anglaise à partir d'un réseau de salles (ABC).
- Alexander
Korda : Hongrois d'origine, il passe par la France avant de créer
en 1932, avec ses frères, la compagnie London Film Productions.
C'est en réalisant en 1933 The Private Life of Henry VIII (La Vie
Privée d'Henry VIII) que Korda devient une référence.
En effet le film rencontre un immense succès aux Etats-Unis, où
le film est nominé pour l'Oscar® du meilleur film, et où
Charles
Laughton reçoit celui du meilleur acteur.
- John A. Rank : Né en 1888, rien ne le prédestinait à
faire du cinéma, en effet, il était dans les moulins, et
c'est là qu'il a fait fortune. Fervent méthodiste, c'est
tout d'abord par esprit d'évangélisation qu'il a commencé
à s'impliquer dans des films en créant la Religious Film
Society puis The Rank Organization. Dès ses premières productions,
Rank se rend compte des difficultés de diffusion des films, et
il réalise assez vite que la clé du succès se trouve
dans le contrôle des salles. C'est ainsi qu'il crée la chaîne
de cinéma ODEON ("Oscar Deutsch Entertains Our Nation")
amorcée par Oscar Deutsch. Il contrôlera jusqu'à 60%
des salles britanniques. En 1936 Rank et Charles Boot fondent les bientôt
célèbres Pinewood
Studios. A la fin des années 30, Rank rachète à
Korda, alors en difficultés financières, ses Denham Studios.
Rank réfléchit beaucoup aux raisons pour lesquelles les
films britanniques ne se vendent pas à l'étranger, une de
ses explications est le manque de stars, il fonde donc une "école
de stars". Il travaille également avec d'autres compagnies
comme Two Cities, Gainsborough, ou encore The Archers (Powell et Pressburger).
En 1946, Rank a plus de biens que la MGM,
il en profite pour essayer de s'imposer aux Etats-Unis, mais en vain.
Cette mésaventure américaine le laissera même proche
de la banqueroute, et il devra vendre ses studios de Pinewood et Denham.
Après
la seconde guerre mondiale, le gouvernement travailliste conduit par Atlee
instaure une taxe de 75% sur les recettes des films américains.
Le lendemain la MPAA
déclare un embargo contre la Grande-Bretagne. Rank se frotte les
mains et se dit que c'est enfin le moment de prendre la place des films
américains, c'est la période du "Bogart or Bacon Debate".
Rapidement cette taxe est remplacée par une limitation des exportations
de devises : au dessus de 17 millions de dollars, les compagnies américaines
ne peuvent plus rapatrier leurs devises.
1948
voit l'apparition de l'une des premières taxes instituées
sur les entrées : c'est la taxe Eady Levy, qui sera supprimée
au milieu des années 80 sous le gouvernement Thatcher.
Entre
1946 et 1984, le nombre de spectateurs passe de 1 milliard 635 millions
à environ 60 millions (500 millions en 1960). Les pertes financières
sont très importantes, Rank éponge les fuites et diminue
sa production. The Rank Organization fermera définitivement ses
portes en 1998.
La question se pose alors de savoir s'il faut produire pour l'international
des films exportables, mais trop chers, ou bien, puisque d'expérience
le cinéma britannique s'exporte mal, se concentrer sur le marché
local. Question qui se pose toujours d'ailleurs.
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