:: Conclusion ::

Même si le héros éponyme du dernier roman de Thomas Hardy est Jude Fawley, il ne peut échapper à personne que le moteur du roman, et de Jude lui-même est le personnage de sa cousine Sue Bridehead.
Et en réalisant Jude, adaptation de Jude l'Obscur, Michael Winterbottom ne s'y est pas trompé; accordant la plus haute importance au développement du personnage de Sue, interprété par Kate Winslet et respectant l'idée de l'écrivain tout en prenant certaines libertés quant au déroulement de l'action. Ainsi la fin a-t-elle été modifiée pour à la fois éviter des longueurs, mais aussi pour ne pas couper net à l'avenir des personnages, même si celui-ci paraît assez inéluctable. En effet, dans le roman, Jude meurt après s'en être retourné auprès d'Arabella, et Sue reprend sa vie de femme mariée avec Phillotson, et la conclusion qui sort de la bouche d'Arabella décrit son malheur : "Elle n'a jamais trouvé la paix depuis qu'elle est sortie de ses bras, et ne la trouvera jamais avant d'avoir, elle aussi, quitté ce monde !".

La fin choisie par Winterbottom n'est pas plus mauvaise, elle laisse Sue et Jude se séparer dans le cimetière enneigé où reposent les corps de leurs enfants. Ainsi, "même si la scène du cimetière sanctionne la défaite de Sue qui abdique son amour devant la pression sociale, le film s'achève sur le refus de Jude, refus de renoncer à l'amour, refus de courber devant les règles, refus de ployer sous le ciel opaque"Jude - Vivantes Couleurs, de Pierre Berthomieu, Positif n°436, décembre 1996.

C'est bien là la preuve que lorsqu'un auteur crée un personnage, en donne sa vision, le personnage existe dès ce moment en tant que tel, et sans pour autant dénaturer l'œuvre originale, un réalisateur peut donc ensuite donner sa propre vision de ce personnage.

"Le cinéaste ne se contente plus de piller comme l'ont fait somme toute avant lui Corneille, La Fontaine ou Molière, il se propose de transcrire pour l'écran, dans une quasi-identité, une œuvre dont il reconnaît a priori la transcendance"Pour un cinéma impur - Défense de l'adaptation de André Bazin, extrait du recueil Qu'est-ce que le cinéma? .

 

sources >>